lundi 27 juillet 2009

Consolation

Pour répondre au commentaire de Charl' au texte de Loève...

Mon fauteuil est vaste comme le calice d'une fleur épanouie.
Je m'y répand toute entière, prenant possession de lui, des accoudoirs à sa tête.
Mon corps est une plage abandonnée après la tempête, ravinée par l'eau de pluie, salée par l'eau des vagues.
Je suis sillonnée de fines coulées blanches, à peine visibles sur ma poitrine endormie.
Ma main sur l'accoudoir sent les déchirures que les griffes d'un chat ont tracées, l'autre main se promène sur le pelage lisse de la chatte blanche qui me tient chaud aux genoux, son ronronnement comme le bruit apaisant d'une cigale en été.
J'entends le bruit de ses clés sur le petit meuble de l'entrée. Il essaie de marcher à pas de loup, ce que sa souplesse lui permet.
Il s'approche de moi, passe sa main dans mes cheveux, m'embrasse le haut du crâne et sursaute en voyant mon visage au maquillage dévasté.
Il ne pose pas de questions.
Il passe ses doigts autour des mèches qui font le tour de mes oreilles, me chatouillant au passage le cou.
Je frissonne.
Il essuie avec ses pouces le khôl qui a tracé un chemin sur mes pommettes.
Il écarte le devant de ma robe et suit de l'index la larme sèche.
Son goût pour l'iode, son amour de la mer, ont raison de lui, pourrait-il se justifier plus tard.
Son souffle assèche la rivière salée, sa langue balaie les cristaux gravés sur ma peau. Il voyage d'une rondeur à l'autre, satisfait et ravi d'y trouver de quoi se nourrir.
La tension retombée après la pluie, mon corps se remet à vivre sous son attention rapprochée.
La chair de poule qui naît sous sa bouche, les frissons qui traversent mes lèvres, je me sens toute entière capable de retrouver le chemin jusqu'à lui, le Consolateur.
Il sait me lire sous ses mains aux doigts interminables, il devine la tristesse, qu'il efface d'une seule caresse.
Sa main passe sur mes paupières, descend sur ma bouche, entoure ma nuque, le pouce juste sous l'oreille, il frôle l'épaule et se faufile à ma taille.
Le fauteuil est assez large pour deux néanmoins je m'y cambre pour laisser son bras entourer ma taille. Il me porte à sa hauteur, je devient toute petite au milieu de lui.
C'est ce que j'attends d'un Consolateur.
Tendrement il me tient serrée, il sait poser son désir au creux de ma paume, attendant que le mien s'en mêle, comme deux mains liées entre elles.

9 commentaires:

  1. De bien jolis mots pour décrire une si belle communication qui elle n'a pas besoin de mots...

    23

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  2. Voilà pourquoi elle a choisi un grand fauteuil....
    Après l'attente, il faut de la place à un coeur malheureux pour se faire consoler !
    Je prends mon petit déjeuner avec vous et après un si joli moment je me sens prête pour la journée !
    Merci ....

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  3. Merci 23, bienvenue, c'est vrai parfois les gestes suffisent, mais j'avoue que j'aime les mots, aussi...
    Virginie, elle a pensé à tout ;-) dès qu'elle a vu ce fauteuil d'un confort incomparable.
    Solveig

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  4. quel plaisir de se laisser emmener dans cet imaginaire inaccessible grâce aux mots...
    merci...

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  5. Oui Charlemagnet..et les mots, ça te connaît!

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  6. Joli voyage salé et mouillé, au creux de la peine, jusqu'à la consolation, juste pour donner du plaisir.

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  7. Oui, juste pour le plaisir, et y parvenir est une chance, non? Merci Yaelle !

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  8. "Tendrement il me tient serrée, il sait poser son désir au creux de ma paume, attendant que le mien s'en mêle, comme deux mains liées entre elles. "

    Une femme qui pleure est d'une beauté troublante à mon sens.
    En tout cas une très belle écriture pour ce moment 'suspendu' comme en apesanteur...

    97

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  9. Merci 97, j'aime avoir votre Point de vue à tous les deux ;-)
    Beauté troublante? oui, parfois, je n'en doute pas...

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Au plaisir de vous lire!