vendredi 17 juillet 2009

L'abricot


Pour une fille du nord comme moi, faire un marché en plein été est un moment privilégié.
Je suis, comme il se doit, vêtue d'une robe courte à petite bretelles, n'y voyez point une coquetterie, mais dès que le chant des cigales s'élève le matin, j'ai très chaud et la robe s'impose.
Je prends mon panier, celui qui est écru et rond, c'est plus facile pour les fruits.
Je marche le nez en l'air parce que le ciel est bleu, que les roses sont belles et que les cris m'émoustillent.
Et puis le parfum des abricots me fait pencher la tête, chercher des yeux l'étal qui les présente, et...
Oui, je les vois.
Une montagne d'abricots.
Ronds, doux, moelleux.
Avez vous déjà regardé un abricot?
C'est de saison, allez donc choisir une belle pièce dans votre corbeille à fruits.
Saisissez le d'une main, dans votre paume. Sentez comme sa peau est duveteuse, elle vous chatouille un peu non?
A présent, vous en choisissez d'autres.
Vous palpez la ronde charnue, vos doigts ne laissent pas de marque, vous savez qu'un appui trop fort risque de blesser la peau du délicat abricot.
Bien sûr au troisième, vous avez envie de caresser le fruit. C'est trop tentant cette douceur. Alors vous passez l'index sur la ligne horizontale qui sépare en deux les joues, vous trouvez qu'elle lui donne l'apparence d'une bouche.
Le marchand vous regarde, heureux de voir votre plaisir dans vos yeux, il entend vos bruits de gorge gourmands, pareils à ceux des enfants lorsqu'ils se mettent à laper une glace de chocolat.
Alors, il vous tente, et vous dit: "goûtez mademoiselle!"
Je porte à mes lèvres l'abricot enjôleur, bouche contre bouche je sépare ses moitiés, mes dents rencontrent le noyau, je le laisse de côté, je remplis de saveur ma gourmandise jamais rassasiée.
C'est sucré. C'est humide, c'est juteux mais pas trop. La pulpe se mâche, elle se laisse retourner en bouche pour que chaque zone de la langue, des joues et du palais puissent apprécier sa saveur.
Tiens, c'est un peu acide aussi, sur les bords de la langue, comme un contraste de sensations.
J'avale enfin ce moment de bonheur, et je souris au marchand, reconnaissante.
Je ne vous dirais pas combien j'en ai pris. Au moins autant que mon nombre d'années.
Et autant de baisers.

7 commentaires:

  1. J'arrive de chez Charles pour relire son dernier texte...
    Et c'est un peu émoustillée quand même que je me délecte des abricots chez vous !
    L'été est propice à toutes les audaces et il faut en profiter..
    "Sucré, humide et juteux mais pas trop", alors ils sont à point pour les confitures, les tartes et les clafoutis et l'imagination !
    Merci et bonne journée à vous deux !

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  2. Un ptit abricot...

    Oui, les formes se répètent à l'infini, et chez les femmes, j'ai un penchant particulier pour les dessous de bras...

    Un petit abricot, les formes se répètent...
    Et deux filles, deux petits abricots...Merci de ce joli texte, Solveig et Loève !

    Besos
    Jack

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  3. C'est vrai que Charl' en préliminaires, ça ouvre l'appétit...merci Virginie, je vais tacher de chercher une recette...autre ;-)
    Jack sous les bras, directement près du corpus sentus..phéromones?
    Deux abricots? rien que deux? non...cela ne se peut.
    S.

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  4. Pour moi, un petit abricot évoquait...
    Vous voyez quoi !

    Petites canailles !
    Besos
    Jack

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  5. L'oralité est notre premier plaisir, le plus ancien et le plus primaire. Joli portrait à la sensualté évocatrice, de ce joli fruit d'été.
    Merci pour le tour de marché!

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  6. imaginez ma gêne lorsque j'ai du choisir ce matin au marché ces fruits sur l'étalage de la marchande...
    elle me regardait dans les yeux en parlant et moi je touchais à 360° et à l'aveuglette ces fruits pour les choisir...
    vraiment ce sont les fruits les plus diaboliques...
    car j'avais vraiment l'impression de caresser votre fruit défendu...

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  7. Le marchand vous regarde… et vous engueule comme du poisson pourri parce que vous allez marquer ses fruits.
    En tout cas c'est comme ça que ça se passe pour moi. Il est vrai que je ne vais pas faire le marché vêtu d'une robe courte à petite bretelles, moi !
    Au demeurant, je fais bien car je ne suis pas certain que ça arrangerait la gravure avec le marchand de fruits et légumes.

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